La Duchesse et le roturier, de la fiction réaliste

Après chaque spectacle, que ce soit en matinée ou en soirée, une faune bigarrée et bruyante envahissait les coulisses du Théâtre National, sans façon, joyeusement, s'installant dans les décors et même dans certaines loges, avec un sans-gêne de propriétaire, interpellant les artistes, leur agitant sous le nez carnets d'autographes et petits cadeaux, riant fort et beaucoup, surtout aux réparties de la Poune qui se laissaient faire de bonne grâce. La loge de la directrice toujours remplie de cris, d'éclats de rire, et souvent même de chansons (on entendait surtout la chanson de la Poune qu'on lui réclamait toujours et qu'elle fredonnait volontiers en signant des autographes).
— extrait de La Duchesse et le roturier de Michel Tremblay, paru chez Leméac (1982), p. 69

Michel Tremblay n’est encore qu’un enfant lorsque La Poune quitte le National. Pourtant, dans son autobiographie, Rose Ouellette précise que l’auteur décrit le théâtre et ses coulisses « comme s’il y avait passé sa vie » (p. 165). Elle ne sait toutefois pas comment l’auteur est parvenu à une telle vraisemblance.

Le roman La duchesse et le roturier ne peut évidemment pas être tenu pour une source au sens de la recherche historique, mais ses descriptions, tant des lieux que de certaines personnalités, permettent néanmoins de transmettre l’ambiance effervescente d’une soirée dans les coulisses du National des années 1940. Lorsque combinée à quelques photos d’archives, notamment celle de Rose Ouellette dans son bureau du National et celle du couloir du théâtre menant aux loges, la lecture de ce livre facilite la compréhension de certains espaces du théâtre ou du caractères de quelques-uns de ses principaux protagonistes. Surtout lorsque ces derniers confirment la ressemblance entre la réalité et la fiction.